mardi 24 janvier 2023

De nombreuses molécules détectées dans un nuage dense protostellaire par Webb

De "Ca se passe là-haut" Accéder au site https://www.ca-se-passe-la-haut.fr/

Une équipe internationale a utilisé les observations du télescope spatial James Webb pour obtenir une vue inédite d'un nuage interstellaire dense. Ces observations révèlent la composition de glaces de l'univers primitif, fournissant de nouvelles informations sur les processus chimiques de l'un des endroits les plus froids de l'univers ainsi que sur les origines des molécules qui composent les atmosphères planétaires. L'étude est parue dans Nature Astronomy.
La nouveauté de ces observations est qu'elles concernent des molécules de glaces qui existent sur des grains de poussière situés dans les régions les plus sombres des nuages moléculaires interstellaires. Ces nuages sont si denses que ces glaces ont été pour la plupart protégées du rayonnement violent des étoiles proches, elles sont donc relativement vierges. Melissa McClure (université de Leiden) et ses collaborateurs fournissent les premiers résultats du programme "Ice Age" qui entre dans le cadre du programme Early Release Science du télescope Webb. Ils révèlent la riche composition de ces glaces dans le nuage moléculaire dense Chameleon I. Ils ont pour cela observé les spectres infra-rouges de deux étoiles situées derrière ce nuage dense (NIR38 et J110621) pour en extraire les raies d'absorption caractéristiques de nombreuses molécules. On y trouve notamment les glaces de CO2 , OCN- , CO, OCS, SO2 et les groupes fonctionnels de molécules organiques complexes comme CH3OH, NH3, NH4. Le profil des glaces de 12CO2 indique une croissance modeste des grains glacés. Les densités des espèces majeures et mineures indiquent que les glaces contribuent entre 2 % et 19 % des bilans des éléments clés C, O, N et S. Les résultats suggèrent donc que la formation de molécules simples et complexes pourrait commencer tôt dans un environnement riche en glace d'eau.

Les chercheurs estiment que les molécules détectées correspondent aux premières glaces qui se sont formées et ils notent qu'elles contiennent des éléments biogéniques, qui sont importants pour la vie. Ces observations fournissent de nouvelles informations sur les processus chimiques dans l'un des endroits les plus froids et les plus sombres de l'univers pour mieux comprendre les origines moléculaires des disques protoplanétaires, des atmosphères planétaires et d'autres objets du système solaire. La plupart des glaces interstellaires contiennent de très petites quantités d'éléments comme l'oxygène et le soufre. McClure et ses collaborateurs remarquent aussi que les glaces détectées grâce au spectromètre NIRSpec, l'imageur NIRCam ainsi que l'instrument MIRI du JWST sont pauvres en soufre, alors qu'on pouvait s'attendre à en trouver beaucoup plus. La prise en compte de la quantité de C, O, N et S dans les glaces est essentielle pour déterminer le bilan global de volatils dans les systèmes stellaires et planétaires qui se formeront dans ce nuage moléculaire. En comparant les densités de colonne des glaces détectées pour les deux étoiles NIR38 et J110621 avec les abondances cosmiques attendues pour C, O, N et S, McClure et son équipe voient au plus 19 % des budgets totaux d'O et de C, 13 % du budget total de N, et seulement 1% du budget du Soufre dans ce nuage dense.

Ces chiffres sont similaires à ce qui a été rapporté précédemment pour les protoétoiles mais ce qui est nouveau ici, c'est qu'on peut retracer les budgets de ces éléments jusqu'à leurs conditions initiales dans des nuages ​​denses. Selon les chercheurs, les quantités manquantes doivent être constituées d'espèces réfractaires, notamment des silicates et des carbones amorphes, ou d'autres glaces telles que N2 qui ne présentent pas de caractéristiques spectrales aux longueurs d'onde étudiées.

Il apparaît en revanche qu'au plus 46 % et 33 % du gaz CO disponible a gelé dans les glaces vers NIR38 et J110621, respectivement. Bien que NIR38 échantillonne une colonne totale de poussière plus petite, sa ligne de visée semble passer plus près de la protoétoile. Selon les chercheurs, si cette région contient de la poussière localement plus dense ou plus froide, cela pourrait expliquer la plus grande fraction de CO total qui est gelée sur les grains.

Une modélisation détaillée pour quantifier la taille, la forme et la porosité maximales des grains de ces glaces est déjà prévue par Melissa McClure dans un futur travail annoncé. Une analyse plus approfondie des voies de réaction et des abondances relatives de glaces nécessite à la fois une modélisation chimique et de futures observations de nuages moléculaires. Des observations moléculaires complémentaires en phase gazeuse confirmeront notamment dans quelle mesure le CO s'est gelé dans cette région. Les astrophysiciens ont déjà obtenu des centaines de spectres de glace dans la même région de Chameleon I avec les nouvelles capacités multi-objets de NIRCam. En combinant ces ensembles de données, la sensibilité exceptionnelle, la résolution spectrale et la couverture de longueur d'onde de Webb permettent désormais de sonder pleinement les conditions initiales de toutes les principales glaces dans les noyaux de nuages moléculaires, juste avant leur effondrement pour former des protoétoiles.

Source

An Ice Age JWST Inventory of dense moleculen cloud ices
Melissa McClure et al.
Nature Astronomy (23 january 2023)
https://doi.org/10.1038/s41550-022-01875-w
Illustrations

1. Le nuage moléculaire dense Chameleon I imagé par le télescope Webb (NASA / ESA / CSA / M. Zamani/M. K. McClure)
2. Spectres mesurés par NIRSpec et MIRI sur l'étoile NIR38 révélant la présence de nombreuses molécules dans le nuage de gaz en avant plan. (NASA / ESA / CSA / M. Zamani/M. K. McClure)

mercredi 18 janvier 2023

mercredi 11 janvier 2023

La Comète C/2022 E3 (ZTF)

La comète C/2022 E3 (ZTF) (DAN BARTLETT / NASA / AFP)

Article de Star Walk (https://starwalk.space/fr)

Selon l’astronome Chris Vaughan, la comète C/2022 E3 (ZTF) est déjà visible sous la forme d’une faible tache floue avec des jumelles ou un télescope dans l’hémisphère nord. Elle atteint son point le plus élevé du ciel avant l’aube. À la fin du mois de janvier, elle deviendra circumpolaire pour les observateurs de l’hémisphère nord et sera visible entre la Grande Ourse et la Petite Ourse en soirée. Les observateurs de l’hémisphère sud devront attendre début février pour la voir. Lisez cet article pour en savoir plus sur la comète qui pourrait bien être la plus brillante de l’année.

C/2022 E3 (ZTF) : nouvelle comète découverte

Le 2 mars 2022, une nouvelle comète a été repérée dans la constellation de l’Aquila, à une distance de 4 UA du Soleil. A l’époque, elle semblait être un point faible avec une magnitude de 17. Trois équipes d’astronomes ont pris des images du nouvel objet pour confirmer qu’il présente une coma et qu’il s’agit donc d’une comète et non d’un astéroïde.

Le nom de la comète contient des informations sur le lieu et la date de sa première observation :

La lettre C signifie que la comète n’est pas périodique (elle ne traversera le système solaire qu’une seule fois ou mettra plus de 200 ans à tourner autour du Soleil) ;

2022 E3 signifie que la comète a été repérée au début du mois de mars 2022 (ce qui correspond à la lettre E selon le système de dénomination des comètes approuvé par l’UAI) et qu’il s’agit du troisième objet de ce type découvert au cours de la même période ;
ZTF signifie que la découverte a été faite à l’aide des télescopes de la Zwicky Transient Facility.

Quand et comment observer la comète ZTF ?

La comète se dirige maintenant vers le système solaire interne et devient progressivement plus brillante. Le 12 janvier 2023, elle atteindra le périhélie, c’est-à-dire qu’elle sera au plus près du Soleil, à une distance de 1,11 UA. La magnitude de la comète sera d'environ 6,5. Le 1er février 2023, elle passera devant la Terre à une distance de 0,28 UA en traversant la constellation de Camelopardalis. C’est le meilleur moment pour voir la comète car elle atteindra sa luminosité maximale. La magnitude attendue dans les différentes sources varie de 5,1 à 7,35. On estime qu’à ce moment-là, la comète sera observable aux jumelles ou, selon certaines prévisions, même à l’œil nu.

Comment voir la comète ZTF ?

Les règles d’observation des comètes sont généralement les mêmes que pour les objets du ciel profond : essayez de trouver le ciel le plus sombre et apportez un télescope ou une paire de jumelles pour obtenir une meilleure image. L’astuce de la vision détournée peut également vous aider à localiser la comète.

La luminosité des comètes est difficile à prévoir : il est arrivé que des comètes, censées être exceptionnellement brillantes, s’assombrissent soudainement ou s’effondrent au périhélie. Il est donc essentiel d’avoir accès aux données les plus récentes.

Comment trouver C/2022 E3 (ZTF) dans le ciel ?

Le moyen le plus simple de localiser la comète est d’utiliser les applications d’observation des étoiles telles que Star Walk 2 et Sky Tonight. Par exemple, si vous utilisez Sky Tonight, appuyez sur l’icône de la loupe dans la partie inférieure de l’écran. Tapez ensuite « C/2022 E3 (ZTF) » dans la barre de recherche et trouvez le nom de la comète qui apparaîtra dans les résultats de la recherche. Tapez sur l’icône cible en face du nom, et l’application affichera la position actuelle de la comète. Pointez votre appareil vers le ciel et suivez la flèche blanche pour le trouver.

Les chasseurs de comètes de la vieille école préféreront peut-être consulter les sites Web thématiques avant la séance d’observation. Par exemple, theskylive.com et astro.vanbuitenen.nl fournissent des cartes de recherche et montrent la position et la trajectoire actuelles de la comète dans l’espace. Sur aerith.net, vous pouvez également trouver des mises à jour hebdomadaires sur les comètes les plus brillantes, notamment les éphémérides et les conditions d’observation dans les différents hémisphères.

Est-ce que C/2022 E3 (ZTF) est visible de la Terre ce soir ?

Si vous vous trouvez dans l’hémisphère nord, vous pouvez déjà voir la comète C/2022 E3 (ZTF) ! Elle a déjà atteint une magnitude de 7 et on peut facilement l’observer avec des jumelles puissantes ou un télescope. Vous trouverez la comète dans la constellation de la Couronne boréale, entre l’astérisme du Trapèze d’Hercule et l’étoile brillante Arcturus dans le Bouvier. Les observateurs de l'hémisphère sud ne pourront voir la comète qu'au début du mois de février 2023.

À la mi-janvier 2023, la comète se déplacera vers la constellation du Bouvier, puis visitera celle du Dragon et la Petite Ourse pendant quelques jours pour atteindre son point le plus brillant le 1er février 2023, dans la constellation de la Giraffe. À ce moment-là, elle réapparaîtra dans le ciel austral et sera visible dans le monde entier avec des jumelles ou, espérons-le, même à l’œil nu.

Le 12 février, C/2022 E3 (ZTF) s'approchera très près de Mars, qui brillera d'une couleur rouge à une magnitude de 0. Les deux objets seront situés dans la constellation du Taureau. Quelques jours plus tard, le 15 février, la comète passera près de l'étoile brillante Aldebaran (magnitude 1) et de l'amas d'étoiles des Hyades.

Conclusion : La comète C/2022 E3 (ZTF) est déjà visible avec des jumelles ou un télescope. Le 1er février 2023, elle atteindra sa luminosité maximale et nous pourrons l’observer à l’œil nu !

Crédit texte:Vito Technology, Inc. Crédit d'image:Vito Technology, Inc.

mercredi 4 janvier 2023

Découverte d'une pouponnière d'étoiles dans la constellation du Serpent

Des centaines de nouvelles étoiles sont dévoilées par le télescope Vista de l'Observatoire Européen Austral.

La nébuleuse Sh2-54 vue en lumière visible par le VLT Survey Télescope, à l'Observatoire de Paranal, au Chili. Credits : ESO

A 6000 années-lumière de la Terre, dans la constellation du Serpent, la nébuleuse Sh2-54 a été photographiée par le Visible and Infrared Survey Telescope for Astronomy (Vista) de l'Observatoire Européen Austral (ESO). Cette pouponnière d'étoiles, dont la dénomination (sh) rend hommage à l'astronome américain Steward Sharpless, qui a catalogué plus de 300 nébuleuses dans les années 1950, est dévoilée pour la première fois.

Les infrarouges pour percer la poussière

Le télescope Vista, installé dans le désert de l'Atacama dans le nord du Chili, est équipé d'un grand miroir (4,1 mètres de diamètre) et d'une caméra de 3 tonnes avec 67 millions de pixels. L'engin fonctionne dans le proche infrarouge, un domaine du spectre lumineux qui est moins affecté par les perturbations causées par les grains de poussières qui masquent nettement plus la lumière visible. Les nébuleuses sont particulièrement concernées par ce phénomène puisqu'elles sont composées de vastes nuages de gaz et de poussière au sein desquels naissent les étoiles.

La nébuleuse Sh2-54 vue par le télescope Vista.
Les nuages de poussière sont moins visibles et plus d'étoiles apparaissent. Crédits : ESO/VVVX.

En savoir plus sur la formation des étoiles

Avec sa vue infrarouge, Vista permet de révéler une multitude d'étoiles cachées derrière les voiles de poussière. Ce télescope est particulièrement utile car il permet aux scientifiques d'étudier de manière beaucoup plus détaillée ce qui se passe dans les pouponnières d'étoiles, et donc d'en savoir plus sur la formation des étoiles. L'image a été prise dans le cadre de l'étude VVVX (Vista Variables in the Via Láctea eXtended). Il s'agit d'un projet pluriannuel qui a permis d'observer à plusieurs reprises une grande partie de la Voie lactée aux longueurs d'onde infrarouges.

Surfer sur l'espace-temps : les ondes gravitationnelles, de la théorie aux découvertes

Conférence du 3 janvier 2023 d'Irina Dvorkin (Institut Astrophysique de Paris - IAP)

Les ondes gravitationnelles, prédites en 1915 par la théorie de la relativité générale d'Einstein, ont été directement observées pour la première fois en 2015, quand le signal produit lors de la fusion de deux trous noirs a été détecté sur Terre.

Depuis, presque une centaine de sources a été observée, ouvrant la voie à l'astronomie en ondes gravitationnelles. Ces observations nous permettent d'étudier des objets astrophysiques jusqu'ici invisibles, et ont déjà donné lieu à de surprenantes découvertes. Dans cet exposé, nous reviendrons sur les bases de la relativité générale afin de donner une description intuitive du phénomène d'ondes gravitationnelles.

Nous discuterons ensuite des différentes sources astrophysiques qui peuvent être étudiées avec ce nouveau messager, et des observatoires terrestres et spatiaux dédiés à l'astronomie gravitationnelle.

Pour visionner la conférence sous Youtube :