dimanche 18 décembre 2022

Des scientifiques découvrent un « trésor enfoui » dans l’une des premières images du télescope James-Webb

Un examen plus approfondi de l'une des premières images du télescope révèle des étoiles naissantes à un stade de développement rarement observé.
Par Marc Zaffagni avec CNET.com vendredi 16 décembre 2022 à 16:30
C’est un cadeau de Noel avant l’heure pour les astronomes. Grâce à ses outils très perfectionnés, le télescope spatial James-Webb réalise des observations avec un niveau de détail inédit. Lors de sa mise en service, les scientifiques ont pointé ses instruments infrarouges vers les « falaises cosmiques » de la nébuleuse de la Carène et, plus précisément, de l'amas d'étoiles NGC 3324. Les images obtenues faisaient partie du tout premier lot d'observations du tout nouveau télescope en juillet dernier. Depuis, les experts ont procédé à une analyse plus approfondie des données et ont découvert une multitude d'étoiles naissantes à un stade de développement rarement observé.

Le télescope Hubble a déjà observé ce coin de l'univers par le passé, mais les capteurs infrarouges de James-Webb lui permettent pour la première fois de voir à travers les nuages de poussière et de gaz et de découvrir des dizaines de jets énergétiques de matière provenant des jeunes étoiles. « Des jets comme ceux-ci sont des indicateurs de la partie la plus excitante du processus de formation des étoiles. Nous ne les voyons que pendant une brève période, lorsque la protoétoile s'accrète activement », explique le chercheur Nathan Smith de l'Université d'Arizona.

Cette fenêtre ne représente que quelques milliers d'années sur les millions qu'il faut à une étoile pour se former complètement. C'est un peu comme si Hubble nous avait permis d'observer une pouponnière d'étoiles depuis l'autre bout du cosmos et que James-Webb avait permis aux astronomes d'ouvrir les portes de cette pouponnière pour avoir un aperçu de la façon dont les nouveau-nés à énergie nucléaire qui s'y trouvent grandissent et se développent.

Des indices précieux sur la formation des étoiles

Nathan Smith est co-auteur d'un article décrivant cette découverte publié dans Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.

« Dans l'image publiée pour la première fois en juillet, on voit des indices de cette activité, mais ces jets ne sont visibles que lorsque l'on se lance dans une plongée profonde, en disséquant les données de chacun des différents filtres et en analysant chaque zone séparément », ajoute Jon Morse, membre de l'équipe du CalTech. « C'est comme trouver un trésor enfoui ».

Les chercheurs affirment que cette découverte pourrait ouvrir une nouvelle ère pour mieux comprendre comment les étoiles comme notre Soleil se forment et comment tous les rayonnements de la formation des étoiles affectent à leur tour le développement des planètes proches.

vendredi 16 décembre 2022

Lancement du satellite SWOT, la nouvelle vigie des lacs et des océans


LE SATELLITE SWOT VA SURVEILLER L’EAU DE LA TERRE.

Le satellite franco-américain Swot doit décoller le 16 décembre 2022 de la base californienne de Vandenberg. Sa mission : surveiller l’évolution des lacs et rivières, et observer la dynamique océanique.

Après plus d’une année d’intégration et de tests dans les installations cannoises de Thales Alenia Space, Swot (Surface Water and Ocean Topography) est aux États-Unis et se prépare pour son décollage. Le satellite de 2,3 tonnes doit s’envoler le 16 décembre 2022, à 12 h 46 heure française, à bord d’une fusée Falcon 9. À quelque 900 km d’altitude, il suivra l’évolution de l’eau terrestre pendant une durée minimale de 3 ans.

En matière d’étude des océans, Swot est le dernier-né d’une longue lignée conçue en partenariat avec la Nasa et le Cnes, l’agence spatiale française. Il s’inscrit dans la continuité d’une aventure débutée en 1992 avec Topex-Poséidon, puis la série des Jason. Lancé le 17 janvier 2016, Jason 3 est à présent dans sa septième année de mission.

Une surveillance fine des fleuves et des rivières

Swot poursuivra cette mission d’altimétrie en se focalisant sur la surveillance du niveau des lacs et des cours d’eau, du débit des rivières et, bien sûr, de la dynamique océanique. En ces temps de réchauffement climatique et de sècheresse parfois prolongée, la gestion de l’eau reste primordiale. À l’échelle mondiale, les services liés à l’eau représentent un chiffre d’affaires de 120 milliards de dollars.

Le nouveau satellite va donc suivre l’évolution des stocks d’eau pour les lacs de 6 hectares et plus, soit l’équivalent d’un carré de 250 m de côté. Des superficies de 100 m par 100 m sont également envisagées. À l’échelle mondiale, vingt millions de lacs devraient ainsi être observés par ce satellite mis au point conjointement par Thales Alenia Space et le Jet Propulsion Laboratory (JPL).

Les utilisateurs des données Swot disposeront de deux niveaux d’informations. « Single Pass » donnera la superficie, la hauteur et l’évolution du stock d’eau. Il sera également possible d’obtenir une moyenne par cycle de 21 jours, durant lequel un lac pourra être observé jusqu’à 12 fois depuis les hautes latitudes. Idem pour les fleuves. Pour chaque passage, c’est un tronçon de 10 km qui sera observé. Au niveau de chaque tronçon, le satellite évalue la largeur, la hauteur, la pente, ainsi que le débit du fleuve.

Prendre la relève des Jason pour les océans

Parallèlement, Swot poursuivra la mission de surveillance océanique dévolue aux satellites Jason. Il permettra aussi d’obtenir des prévisions météorologiques plus précises, notamment saisonnières. Afin d’accomplir ces différentes tâches, il possède plusieurs équipements dont la masse totale s’élève à 900 kg.

La préparation du satellite Swot

Le satellite Swot a été assemblé à Cannes, chez Thales Alenia Space. © Cnes/Thales Alenia Space
Dès juin 2021, la charge utile du satellite a été expédiée via un avion-cargo C-17 de l’US Air Force. Son module Nadir reprend ainsi les mêmes instruments que ceux du trio Jason, dont l’altimètre à double fréquence Poséidon fabriqué par Thales Alenia Space. Nadir inclut également pour l’orbitographie de précision le système Doris, mis au point par Thales, ainsi que le radiomètre micro-ondes avancé AMR. Deux dispositifs du JPL complètent ces équipements : la charge utile de localisation (GPS Payload) et les réflecteurs laser LRA.

Des mesures améliorées d’un facteur 10

Mais le nerf central de Swot est KaRin (Ka-band radar Interferometer), l’altimètre interférométrique conçu par le JPL pour mesurer la hauteur des surfaces d’eau. Le Cnes et Thales contribuent à KaRin en apportant la plateforme de radiofréquences (RFU) intégrée. L’instrument comporte deux antennes SAR en bande Ka, éloignés de 10 m l’une de l’autre. Elles doivent permettre de réaliser une observation bidimensionnelle de 120 km de large avec une résolution horizontale comprise entre 50 et 100 m et programmable de part et d’autre de la trace.

Par rapport à la précédente génération, la résolution obtenue avec Swot doit être améliorée d’un facteur 10. Comparé à Jason, qui pouvait transmettre jusqu’à 80 kbits/s de données, Swot pourra transmettre jusqu’à 349 Mb/s avec KaRin. Mais la capacité générée chaque jour peut aller jusqu’à 7,9 Tb.

Première mission du Cnes avec rentrée contrôlée

Afin d’assurer sa mission de trois ans, possiblement cinq, ce satellite dispose de deux jeux de panneaux solaires fabriqués sur le site de Cannes et capable de fournir jusqu’à 8 kW d’énergie électrique. Pour fonctionner, la charge utile a besoin de 2 kW. Une fois déployés, les panneaux ont une surface totale de 31 m2 et confèrent une envergure de 16 m au satellite, dont la propulsion est assurée par 360 kg de monohydrazine.

Au terme de sa mission, Swot utilisera 80 % de son carburant pour effectuer une rentrée contrôlée au-dessus du Pacifique Sud. Pour la première fois, le Cnes sera chargé d’assurer les procédures de fin de vie du satellite.

Celui-ci a été acheminé aux États-Unis le 16 octobre dernier par un C-5 Galaxy de l’US Air Force. Suite au conflit russo-ukrainien, les cinq derniers Antonov-124, habituellement utilisés pour ce type d’opération, sont aujourd’hui réquisitionnés par l’Otan. Ce 16 décembre 2022, Swot doit être lancé depuis la base spatiale de Vandenberg, sur la côte est américaine, par une fusée Falcon 9 sur orbite basse (LEO) à 891 km d’altitude avec une inclinaison de 78°.

Pour le lancement de Swot, le Cnes réalise un direct sur YouTube, le 16 décembre 2022, à partir de 12 h 15.